[
./menu_litteraturepag.html]
LIT
TER
ATU
RE
[
mailto:f.aribit@free.fr]
CO
NT
A
CT
La Boite Alerte
Frédéric Aribit
[
./indexpag.html]
B
L
O
G
[
./menu_musiquepag.html]
MU
SI
QUE
Le jazz vient faire la java
Claude Nougaro
Il est “l'occitan basané”, comme dit son ami l'écrivain palois Christian Laborde, “le gascon d'Honolulu”. Claude Nougaro, “l'homme aux semelles de swing”, vient en chansons faire la drague douce à Bayonne. Quand la poésie sort son plus beau costard. Rencontre.
À Marie-Christine, vous disiez il y a quelques années déjà que vous ne feriez plus le con, que vous apprendriez enfin vos leçons et que vous n'écririez plus de chansons. Franchement, Claude Nougaro, est-ce bien sérieux, passé les 60 berges, de pratiquer encore l'art mineur ?
C'est une question qu'évidemment, bien après mes premiers serments de vigne, je me pose, parce que je crois que le milieu de la chanson ne me va pas. Le music-hall d'une certaine époque était intéressant pour moi, avec les moyens que j'avais, mes dons, mon désir d'écrire une langue d'images, mon goût pour la musique classique aussi, puisque je viens d'une famille qui m'a bercé d'opéra, la révolution presque physiologique qu'a enfin été pour moi le jazz… La chanson réunissait alors ces amours-là, ce pays intérieur qu'on a pour s'exprimer. Mais est-ce sérieux maintenant… Quand je vois le supermarché dans lequel j'évolue, avec tous les manèges qui tournent, ça fait drôle, oui, de se retrouver dans cette curieuse fête foraine. Certaines races se sont éteintes, c'est pareil en littérature, en musique classique ou même en jazz, les grands créateurs sont disparus sans doute.
On vient de fêter l'anniversaire de la mort de Jacques Brel et France 2 avait préparé une émission hommage où chantaient notamment Lara Fabian et Indochine. “L'aigle noir” de Barbara vient d'être remixé en version dance. Faites-vous une distinction entre les joyaux et la pacotille ?
Brel appartient au peuple. Les chanteurs populaires comme les chanteurs de variétés pratiquent peut-être un art que l'on peut dire mineur, par rapport à certaines exigences plus hautes. Quand on chante c'est pour plaire à un peuple. C'est donc déjà très bien d'avoir son public. Mais ce qui est encore mieux, c'est de faire se lever un peuple dans sa voix, et c'est ce que je cherche, moi, par la chanson. J'essaie de m'adresser à un interlocuteur, au peuple, aux mystères qui nous entourent, je ne sais pas trop. J'essaie en tout cas de dépasser les bornes de la chanson en y mettant un être interne qu'elle ne demandait pas forcément. J'ai décidé de jouer la chanson comme un vrai jeu poétique, où le tissu de ma vie, spirituelle, charnelle, est complètement engagé. Alors c'est vrai que de par ma nature même, j'ai toujours été isolé, je suis un loup-garou assez solitaire et si l'on veut me brancher sur un arbre généalogique d'influences, entre ma mère pianiste d'origine italienne et mon père chanteur, on me trouve très tôt dans le bocal lyrique de l'opéra. J'aime tout ce qui chante, et même chez les grands instrumentistes de jazz, j'aime avant tout ceux qui chantent avec leur instrument, Armstrong, Miles Davis. Ce sont des voix, et la voix est une vraie palette. Pour tout dire, je n'aurais jamais eu les couilles d'écrire des poèmes après tout ceux que j'avais lu. Par contre, j'ai senti que la voix était ma voie.
Vous avez dit un jour que vous préfériez Solar à Sollers. Est-ce que vous n'êtes pas prêt à tout pour faire un bon mot ?
Oh, ça, c'était une saillie de toulousain à Paris… Quand ça me ricoche dans la bouche, ça part comme ça… Et puis Sollers n'est pas un des grands chocs littéraires de ma vie, non… Les mots, je les aime de façon tout à fait sensuelle, mais aussi comme matière vivante, une matière qui a une puissance avec laquelle j'essaie d'agir pour voir se lever des visages ou des paysages. Pour peindre mon cinéma mental, oui, ce sont bien mes ciné-mots... J'aime dans la poésie le passage des mots à l'acte, une image qui vous fait venir les larmes aux yeux, pas les jeux de mots secs, les petits trafics. Je ne me sers pas des mots, je suis plutôt l'esclave du vocabulaire.
L'Enfant-Phare, votre dernier album, réunit autour de vous des musiciens qui semblent énormément compter dans votre parcours. Peut-on dire qu'il y a une tribu Nougaro ?
Cela fait maintenant 4 ans que je tourne avec ce groupe là, nous avons fait beaucoup de progrès et il y a maintenant un vrai bonheur à jouer. Je crois qu'ils ont vu peu à peu qu'un tour de chant, ce n'est pas que de la musique, c'est également un action dramatique. Il y a pour moi une vraie théâtralité et mes chansons mises bout à bout, c'est le petit opéra de ma vie personnelle. Au début, fou de jazz, je me faisais accompagner par les solistes de l'époque, Vander, Eddy Louis, Lubat… Maintenant, les musiciens mêlent un peu tous les langages. Jean-Marie Ecay est un guitariste d'une richesse, d'une invention phénoménale. On entend dans son jeu l'Espagne frémir et je me régale. J'ai d'ailleurs écrit pour la première fois des chansons avec mes musiciens, Laurent Vernerey, par exemple. Je veux avant tout qu'ils jouent avec leur instinct, je suis comme un oiseau qui va de branche en branche. Toutes ces rencontres font de moi un animal bigarré, un arlequin de la chanson. Et si les choses sont vraies, ça va vite.
Jean-Marie Ecay sera le régional de l'étape bayonnaise. Pouvez-vous le croquer pour nous en deux mots ?
J'ai rencontré Ecay lorsqu'il travaillait avec Bernard Lubat. J'ai fait quelques répétitions avec lui, pour un carnaval à Toulouse, dirigé par Claude Sicre, des Fabulous Troubadours. Je l'ai ensuite perdu de vue, même s'il apparaissait toujours dans des aventures musicales très intéressantes. A un moment donné, j'ai cherché une rythmique et j'ai entendu un disque de Didier Lockwood, avec lequel il collaborait depuis longtemps. Il était là avec Loïc Pontieux à la batterie et Laurent Vernerey à la basse. Le trio tournait bien et par chance était libre, je les ai donc engagés. Jean-Marie vient parfois me voir à Biarritz, où il m'arrive de faire des cures de thalassothérapie, lorsqu'il est lui-même de retour dans les environs. C'est aussi lui qui m'a indiqué le percussionniste actuel, Denis Benaroche, qui apporte beaucoup de belles couleurs. J'ai un petit coin dans les hauts de Corbières, un petit village charmant, où j'avais amené le groupe pour faire des maquettes. J'avais envie de peindre cette nature en chanson, et un soir, c'est là que Jean-Marie a composé la très belle musique de Bras dessus bras dessous, d'une structure très subtile, une de mes chansons préférées du disque.
On sait que vous avez une géographie intime assez forte, avec Toulouse bien sûr en plein cœur. Comment s'inscrit le concert de Bayonne dans votre tournée ?
Vous savez, il y a une chanson dans mon dernier disque sur le rocher de Biarritz, rocher couronné d'oiseaux, et que je voyais depuis la fenêtre de ma chambre, en thalasso. Ce concert à Bayonne sera l'avant-dernier de ma tournée. Quand je chante, j'y vais à fond, à Bayonne, à Lille, ou a Carpentras, mais c'est vrai qu'après les 140 concerts que nous avons donnés, depuis l'été dernier, quand les marins et l'équipage touchent le port, il y a un manque.
Une encyclopédie écrivait à votre sujet : “Trapu, avec une gestuelle imprécise, Claude Nougaro évoque un peu un boxeur et chacun de ses récitals est mené comme un combat”. On dit aussi de vous que vous êtes une institution de la chanson française…
Une gestuelle imprécise ? !… [Hélène Nougaro se marre et corrige à l'arrière : oui, tu avais même voulu remplacer “imprécise” par “expressive” !…] Oh la, là j'ai tout ce qu'il faut, trapu avec une gestuelle imprécise !… Quelles conneries ! J'ai moi-même un peu fabriqué cette mythologie du boxeur, avec “Quatre boules de cuir”, par exemple, et une certaine attitude, peut-être, oui, j'ai donné du grain à moudre à ce genre de clichés, mais là… un ange passe. Et puis l'institution ! C'est le bouquet ! Une certaine longévité peut faire dire des choses comme ça, un type qui tient le coup alors qu'on l'a dit has been, complètement démarqué… Si je continue à chanter à 68 ans [il se retourne vers Hélène et demande : 69 ?…], bon, 69 ans, c'est qu'il y a une véritable communauté avec le public, ce peuple de la voix dont je parlais tout à l'heure…
[
./menu_cinemapag.html]
C
IN
EMA
[
./menu_photospag.html]
P
HO
TOS
[
./lienspag.html]
LI
E
N
S
[
Web Creator]
[
LMSOFT]