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B L O G
American Vertigo L’état désuni de l’Amérique selon BHL
Qu'est-ce qu'être américain aujourd'hui ? Et qu'est-ce, au juste, que l'Amérique ? Idée folle, terre grandiose, peuple fier… Les clichés abondent dès qu'on envisage, vu d'Europe, les États-Unis, avec le regard empreint de cette défiance qui s'appelle souvent “antiaméricanisme”, primaire ou pas. À l'invitation du magazine Atlantic Monthly, Bernard-Henri Lévy a remis, quelque 173 ans après, ses pas dans ceux d'Alexis de Tocqueville, qui partit aux États-Unis étudier le régime pénitentiaire et en revint, un an plus tard, au terme d'un périple à travers tout le pays, avec une analyse considérable traitant De la démocratie en Amérique. L'essai mosaïque initialement publié en 2006 par BHL s'accompagne désormais d'un véritable carnet de route filmique, réalisé par Michko Netchak sur un scénario de Gilles Hertzog.
[http://www.dvdrama.com/news.php?20774]
On se souvient sans doute du ramdam médiatique qui accompagna la publication de American Vertigo, Outre-Atlantique d'abord. Interview par Tina Brown, ex-rédactrice en chef de la revue Vanity Fair, à la New York Public Library, devant un public payant de près de mille personnes au premier rang duquel on reconnaît Lauren Bacall, événement réédité quelques jours à peine plus tard au célèbre “Y”, haut lieu culturel new-yorkais devant pas moins de neuf cents personnes, puis à l'Athenæum de Boston… Quelques stars du rock en pâlissent encore. En quelques semaines, BHL était numéro un des ventes dans le Massachusetts d'après le classement du Boston Sunday Globe (huitième vente selon le Los Angeles Times, quinzième pour le New York Times). Et force est de reconnaître que l'essai qui réunissait ses réflexions, écrites et publiées “à chaud” dans le magazine américain, ne manque pas d'intérêt. De l'omniprésence étrange du drapeau dans le paysage américain, à une plongée effroyable dans les gouffres de ses prisons publiques ou privées (Rikers Island à New York, la célèbre Alcatraz bien sûr, Angola à New Orleans, la prison pour femmes de Southern Nevada, Guantanamo), lieux sordides qui, cachés, enfouis, écartés de tout ce qu'un pays veut voir et montrer de lui-même, s'avèrent paradoxalement terriblement révélateurs… De cette furie américaine de tout récupérer, bricoler, muséifier et mythifier aussitôt, fût-ce au détriment de toute espèce de véracité historique, le base-ball, un faux fossile d'homme préhistorique, la prochaine chambre d'hôtel de John Kerry, manie dont Umberto Eco (La Guerre du faux) avait déjà dit tout le risible et l'inquiétant, jusqu'à l'incroyable, l'incompréhensible melting-pot ethnique, social, culturel, linguistique, religieux, qui fait le fond même de la démocratie américaine, son sens inouï de la tolérance, mais aussi son organisation cloisonnée, communautariste, “balkanisée”… De la folie des grands espaces urbains, naturels, architecturaux, à la paranoïa sécuritaire, qui impose non pas la liberté de circulation, mais son obligation, et conduit au “Mur de la honte et de la mort” érigé entre San Diego et Tijuana… De l'omniprésence des religions de tout poil dans la vie quotidienne, essor créationniste compris, à la frénésie libertaire d'une San Francisco, par exemple, d'où continuent toujours de partir de nouvelles “Beat Generations”… C'est toute une radioscopie de la société américaine qui passe au crible des analyses du philosophe. On croise aussi, dans le livre de Bernard-Henri Lévy, pas mal de figures décisives du panorama artistique, intellectuel, politique, social, des Etats-Unis d'aujourd'hui. Sharon Stone. James Ellroy. Jim Harrison, “écrivain, donc dissident”. Bush, évidemment, cet homme “né pour perdre”, dont on se demande encore comment lui, “le raté, le brave type, l'homme à qui l'on n'aurait donné aucune espèce de chance d'échapper à sa formidable médiocrité, s'est transformé en cette machine, capable de remporter une fois, puis deux, la compétition la plus difficile d'Amérique et de la planète”. Le style de BHL, son emphase, sa solennité presque héroï-comique, parfois, ce côté dissertation de philo, avec cette manie dialectique de finasser sur de légitimes indignations, cette volonté un peu crâne, enfin, de s'inscrire personnellement dans une haute lignée d'écrivains et d'intellectuels tous fascinés par ce pays (après Tocqueville, Chateaubriand, Céline, Sartre…), peuvent parfois agacer. Et comme toujours, les critiques n'ont pas manqué de pleuvoir sur sa tête, aux USA comme en France. Reste que le tableau qu'il dresse de l'Amérique se révèle souvent d'une grande subtilité, et suggère une palette autrement plus riche que celle qu'on s'accorde souvent à concéder et à l'Amérique d'une part, cet “autre qui nous parle de nous”, ce miroir d'un futur imminent, cette “machine, non à remonter, mais à descendre les chutes du temps”, Nation-Idée capable, par cette idéalisation même, de pérenniser le désir qu'elle provoque ; et à son analyste d'autre part, assurément moins inspiré lorsqu'il mélange douteusement les genres (Qui a tué Daniel Pearl ?) que lorsqu'il repart en campagne pour dénoncer telle ou telle barbarie (le Darfour), et dont l'essai termine ici sur une longue synthèse en forme d'épilogue qui condense, quoique d'un optimisme général discutable à plus d'un titre, des observations d'une grande acuité. Il n'est pourtant pas certain que le documentaire que Michko Netchak a tiré de ce périple sur un scénario de Gilles Hertzog fasse le même raffut que le livre. Netchak, Hertzog, Lévy : trois hommes dont le dénominateur commun se trouve quelque part dans l'ex-Yougoslavie, dans l'histoire déchirée et encore brûlante de ce morceau d'Europe où Michko Netchak naît en 1959. En 1992, déjà, BHL filme pour France 3 le documentaire Un jour dans la mort de Sarajevo. Deux ans plus tard, Gilles Hertzog cosigne avec lui le scénario du long-métrage Bosna !, puis tourne l'année suivante pour Arte Armija, un doc sur l'armée bosniaque. La question ne les quittera pas. En 2001, Netchak donne Serbie, année zéro alors que Hertzog dénonce les massacres de Srebrenica (Srebrenica, une mort sur ordonnance). Mais que reste-t-il ici de l'essai d'origine ?... Assez peu, finalement. Ou trop, si l'on veut. Le parti pris de conserver une structure en forme de gigantesque puzzle qui, pièce après pièce, présente les étapes du voyage de BHL comme autant de fragments impossibles à synthétiser, passe mal le cap de l'écran. En résulte l'impression d'un film qui n'a pas pu, n'a pas su, choisir dans la masse considérable de séquences que l'essai laisse supposer. En résulte aussi un assez désagréable effet de moteur qui ne part jamais, les inserts censés situer l'action ramenant plutôt l'ensemble à une juxtaposition pénible de saynètes où texte en voix off et images simplement “illustratives” se répètent inutilement. Bien sûr il y a la trogne inouïe de Jim Harrison. Ses yeux (son œil). Ses dents. Sa bière. Son rire convulsif. Bien sûr il y les mimiques du fils Reagan évoquant comiquement son impudence devant Bush. L'image terrible de ces populations noires sous le déluge de Katrina. Mais outre qu'on ne peut que regretter l'absence de certains moments particulièrement forts ou cocasses de l'ouvrage, outre que l'immensité, la beauté des paysages américains transparaît finalement peu, il faut encore déplorer la voix off de Jean-Pierre Kalfon, aux intonations inutilement appuyées, aux effets ostentatoires, qui finissent par alourdir le propos. D'autant que l'habillage musical d'Alexandre Habic (roulements de toms de batterie…) achève de vieillir regrettablement le documentaire, et contribue finalement à susciter chez le spectateur le sentiment d'un constat déjà obsolète. (Voir aussi sur excessif.com)
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MU SI QUE
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LI E N S
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